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7 mai 2009 4 07 /05 /mai /2009 17:49

REVELATEUR D’IMAGES

 

Un livre de Joël GAUCHER édité aux éditions SILOE

Préfacé par Gilbert SCHLOGEL.

 

L’auteur, infirmier militaire, appelé en ALGERIE, y raconte sa drôle de guerre aux portes du désert ALGERIEN. Agé de 20 ans, après quatre mois de classes au centre d’instruction du service de santé au Fort Neuf de VINCENNES, il est propulsé en ALGERIE dans un univers de cruauté et un monde inconnu, à la fois captivant et terrifiant, imprégné de peur et de violence, de souffrance, de dégoût, de haine, de sang, de malheur et de mort.

Avec le recul et la maturité indispensables à cette réflexion, il s’est décidé enfin à regarder dans le rétroviseur, à revenir sur ses traces, pour y retrouver son parcours dans ce monde impitoyable. Au travers de ses propos, on perçoit ses difficultés à occulter le passé et à tourner la page, à se détacher et se délivrer du poids de ses souvenirs lourds à porter, toujours présents et vivaces et qui continuent de l’habiter, malgré les 45 années écoulées.

On ressent en lui un besoin de se confier, de se soulager, de reprendre son souffle et de se libérer en écrivant. Son récit, teinté d’humanité et témoignages riche en confidences, est un mélange de sincérité, de gravité, d’ironie, et de fantaisie, ce qui laisse penser que le sens de l’humour, décapant, acerbe, ironique, malicieux et même parfois impertinent ou insolent, voire irrévérencieux ne l’a pour autant pas quitté.

 

Un très beau livre, très bien écrit, plein d’humour et poétique.

 

Michel FETIVEAU. 

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28 mars 2009 6 28 /03 /mars /2009 18:31

INTERVIEW DE JEAN PIERRE BRESILLON APPELE AU 1/22 R.I.

Auteur de CRAPAHUT

 

Jean Pierre BRESILLON vous avez été sensibilisé par la guerre d’Algérie avant même votre service militaire. De quelle façon ?

 

     Je suis né le 1er juillet 1938. Après avoir passé les années de guerre en Saône et Loire, je suis remonté sur Paris pour y suivre mes études. J’y ai passé mon bac de philo en 1956, c’est à dire l’année des rappelés. Ensuite, je suis entré en fac de Lettres. Dès ce moment là, je peux dire que mon expérience Algérienne a commencé. Les étudiants savaient très bien ce qui se passait en Afrique du Nord. La manifestation des rappelés de la caserne Charrasse est passée sous mes fenêtres et je me souviens très bien des slogans lancés sur la voie publique : " Les rappelés à la maison ! ", " Paix en Algérie ! "," Les papas au foyer ! "….

     Je n’ai jamais oublié cette expression collective du refus. J’habitais un quartier ouvrier de Courbevoie où vivaient de nombreux Algériens. J’ai même assisté dans ma rue à une fusillade entre les gens du M.N.A. et ceux du F.L.N. un samedi soir à l’heure de l’apéritif.

     En fac, l’un des plus grands chocs de ma vie d’étudiant a été la démission du Général de BOLLARDIERE en raison de la torture en Algérie. Les plus politisés d’entre nous parlaient d’indépendance mais pour la plupart, c’était l’état de guerre qui nous choquait et plus particulièrement encore la torture.. Ceux qui revenaient de là-bas nous racontaient comment fonctionnait la « gégène » et ces informations nous donnaient matière à réflexion.

     En même temps, je me rendais bien compte qu’il était anormal de disserter pendant que les gars de notre âge, non sursitaires, faisaient la guerre. Mes copains de Saône et Loire m’écrivaient ce qu’ils faisaient en Algérie et j’étais très au fait de ce qui s’y passait. Après avoir commencé à enseigner pendant un an et parce que pendant cette période je n’étais plus inscrit en fac, mon sursis a sauté. J’aurais très bien pu manœuvrer pour le faire renouveler sur un autre motif mais je me suis dit : " Adieu va, j’y vais ! ". Evidemment, j’ai fait pleurer ma mère mais j’ai bénéficié d’une chance inouïe en ayant été affecté au 93ème R.I. cantonné au camp de Frileuse, près de Versailles.

 

Vous n’êtes donc pas parti tout de suite en Algérie ? Que s’est-il donc passé ?

 

     En dépit de mes sentiments un peu contestataires, je me suis pris d’amitié pour mon chef de section qui m’a fortement poussé à faire les E.O.R. J’ai donc passé le concours d’entrée à Cherchell en trainant un peu les pieds car je n’y tenais pas beaucoup. Suivre un peloton de cabots ou de sergent, passe encore…. Mais accepter les responsabilités de Sous Lieutenant, cela faisait beaucoup ! Avoir la charge de trente appelés comme moi et les emmener au feu, ce n’était pas du tout évident. Nous savions qu’il se passait des choses graves en Algérie. Mon chef de section y avait perdu un bras et nous voyions revenir de vieux sous-off qui nous racontaient la guerre. Toujours est-il que j’ai été considéré comme reçu. Là dessus on m’a sorti du " renfort ", c’est à dire de ceux qui devaient partir en Algérie et un gars a été désigné à ma place. Il se nommait Roussel mais nous l’appelions Bouin Bouin parce qu’il était de BOHAIN dans l’AISNE. Il était d’une timidité extrême et n’a jamais osé dire qu’il avait un gosse et que sa femme était enceinte d’un deuxième.

     Entre temps, les résultats officiels de CHERCHELL sont arrivés mais….. je n’étais pas reçu ! Comme j’étais sorti du " renfort " , je suis resté en France pendant un an. Quant au brave Bouin Bouin , on lui a donné une planque relative en Algérie puisqu’au lieu de partir en Compagnie, il a été nommé vaguemestre. Et ce pauvre gars a sauté sur une mine à son premier convoi. Il est mort….  Pour moi, cet événement a été un choc puisqu’il était parti à ma place.

     Après cette période d’instruction à Frileuse, je suis tout de même parti en Algérie mais pour un séjour plus court que les autres. Embarqué au début de 1961, il ne me restait plus qu’un an à faire sous le soleil d’Afrique. Aussi, je me suis considéré comme privilégié à double titre. D’abord parce que j’y suis resté que peu de temps, ensuite parce que l’époque (1961) pouvait être considérée comme un peu plus calme.

 

Quelle a été alors votre affectation et à quel type de combats avez vous été confronté ?

 

     Mon séjour n’a pas été dur mais il s’est montré tout de même assez âpre. J’appartenais au 1er Bataillon  du 22ème Régiment d’Infanterie basé à GOURAYA, à l’ouest de CHERCHELL en direction de TENES. Dans ce bataillon , deux compagnies de bord de mer assuraient les ouvertures de routes tandis que deux compagnies de montagne tenaient lieu d’unités disciplinaires. En réalité ce bataillon était assimilable à un régiment ; Lorsque je suis arrivé, j’ai demandé à être affecté au peloton blindé comme chef de bord d’un half-track ; Ce n’était pas très malin car cette fonction était dangereuse mais le boulot me plaisait. Comme sergent, je me voyais déjà circuler sur les routes du bord de mer avec une équipe de bons copains. Ma déception fut grande lorsque je fus désigné pour une compagnie de montagne…disciplinaire ! Je ne sais pas ce qui m’a valu cette affectation. Peut être parce que j’étais considéré comme une forte tête. Bref, je suis arrivé dans le poste de BOUZEROU où la discipline était effectivement très sévère. Il y avait une majorité de harkis que nous devions encadrer. Nous étions semi opérationnels pour faire ce qu’on appelait alors la pacification. Nos sections assuraient les opérations, tandis que celle du commandement s’occupait de l’école, de la S.A.S., de la distribution de la nourriture et de l’assistance médicale. L’un des deux Aspirants était un jeune à qui j’avais fait les classes en France. Il était  mon supérieur hiérarchique mais je le tutoyais tout de même au grand amusement des autres. Il m’arrivait même de l’engueuler lorsqu’à mes yeux, il commettait une erreur.

     Moi , j’étais à la fois armurier et…. Bouche trou de section pour des remplacements de diverses natures. Si bien que j’ai touché un peu à tout. C’est comme ça que je suis parti en opération dès le deuxième jour . Cette histoire n’a pas été très belle et n’a plu à personne.

     Une de nos section avait découvert une grotte . Pour y pénétrer, il fallait ramper. Le plus petit du groupe, l’infirmier, a pris son arme et s’est introduit par l’orifice. Les fells étaient à l’intérieur et lui ont tiré un coup de fusil de chasse en pleine figure. Il n’a pas été tué et on a pu le récupérer en le tirant par les pieds. Ensuite la grotte a été investie, et tout le secteur s’est vu bouclé et ratissé. Tous les habitants du village ont été très vite arrêtés. Cette rafle a été ma première mission en Algérie. Même sergent, j’étais tout de même un bleu et lorsque j’ai vu vider les mechtas à coup de crosse, sortir les femmes, les gosses et les vieux pour les placer face à la grotte, je n’étais pas très fier. En réalité, nous pensions que ces gens connaissaient ceux qui étaient à l’intérieur de la grotte et qu’ils parviendraient peut être à les en faire sortir. Il se trouvait que les hommes piégés n’étaient pas les " cousins " des habitants, mais des chefs politico-militaires venus de TUNISIE. L’un des hommes du village a été envoyé de force dans la grotte mais là aussi, il s’est fait recevoir à coups de fusil . Ensuite, le Génie est venu et a envoyé des gaz à l’intérieur. Au bout de trois jours, l’un des assiégés à été battu et les autres ont fini par céder. Cela n’a pas été joli joli.

     Au cours de l’opération de ratissage qui a accompagnée cet épisode, j’ai dû arrêter un gars qui faisait des signaux de nuit pour prévenir les fells. Ce gars, c’était un gosse de 10 ans ! vous n’imaginez certainement pas l’effet que ça fait de mettre la main sur l’épaule d’un gamin…. C’est affreux !

 

Que sont devenus les prisonniers de la grotte ?

 

     D’abord, ils se sont tirés dessus entre eux. Certains voulaient sortir, d’autres pas. La demi-douzaine de types que nous avons récupérés ont été emmenés et nous ne les avons jamais revus. Il s’agissait d’officiers et, bien sûr ils ont été interrogés. Vous imaginez comment…. Là, j’ai eu vraiment connaissance de ce qui se passait au niveau des interrogatoires. Tous les harkis qui étaient avec nous manifestaient une haine incroyable à l’égard de ceux qui étaient dans la grotte. Ils leur en voulaient à mort et répétaient à qui voulait les entendre " plus on en tuera et mieux cela vaudra ". Ces harkis nous étaient d’une fidélité remarquable mais leur  violence nous apparaissait tout de même choquante. Le village de CHAAFFA où s’est passée cette histoire était un " mauvais village " car il ne nous fournissait pas d’aide. Aussi, lorsque nous avons dit à nos harkis que nous avions un motif pour y faire une rafle, ils ont crié : " Ah, enfin nous allons pouvoir leur battre le cul à ces salauds là ! Depuis le temps qu’ils se foutent de nous, qu’ils aident les fells et qu’on ne peut pas les coincer, cette fois on les tient ! "

 

Vous avez aussi été amené à contrôler les villages. Comment procédiez-vous ?

 

     Nous avions en surveillance une douzaine de villages dont la plupart étaient " fidèles " mais dont deux étaient ralliés aux fellaghas. Mais pour exercer une action quelconque, il nous fallait une preuve, une raison. A CHAAFFA, nous avions tout cela avec l’histoire de la grotte.

     Par la suite, j’ai participé à deux autres actions similaires mais il n’était jamais question de faire une descente sans raison et de brutaliser la population. Il est même arrivé que lorsqu’une opération de ce genre se produise, une plainte était déposée au P.C. du régiment et que le sous-off responsable soit sanctionné.

     Au bout d’un certain temps, je suis resté dans mon magasin pour exercer mes fonctions de fourrier armurier. Cette période était un peu plus reposante et je travaillais comme un fonctionnaire avec des horaires et une routine inattendus. J’étais aidé par un harki dévoué jusqu’à la mort et mon rôle était de m’occuper des munitions, d’entretenir l’armement, de l’attribuer en fonction des besoins et de passer des revues d’armes dans les sections. De plus, je devais m’occuper des convois et des liaisons vers les avants postes. Chaque fois qu’un camion quittait la compagnie, j’étais dessus. Par ailleurs, j’étais responsable du mortier pendant les opérations. J’avais un gros 120 qui m’a d’ailleurs coûté un tympan et je n’entends plus de l’oreille droite. Vous voyez que j’étais un homme très occupé et je vous assure que je ne m’ennuyais pas. Je devais aussi assurer l’armement des groupes d’autodéfense dans les villages que nous contrôlions. Je distribuais aux musulmans des villages fidèles des armes soigneusement  comptabilisées sur un registre spécial que l’A.L.N. aurait probablement bien voulu récupérer ; Périodiquement, je me rendais dans les villages avec un petit groupe de 7 à 8 hommes pour contrôler ces armes et pour apprendre aux habitants à s’en servir.

     Un jour, au cours d’un de ces contrôles, il manquait un homme à l’appel. Il s’agissait du maire qui n’est arrivé que l’après midi. Lorsque je me suis présenté chez  lui, il m’a fermé la porte au nez. L’incident m’a paru insignifiant mais je l’ai tout de même signalé au comandant de compagnie ; Alors, on a interrogé le bonhomme et on a trouvé chez lui des armes qui n’étaient pas les nôtres. Je n’ai pas besoin de vous dire comment on l’a fait avouer et comment il en a dénoncé d’autres. Les "interrogatoires " se sont succédés et nous avons trouvé une quarantaine de types impliqués dans un village pourtant catalogué " ami ".

     Autant ma position pouvait être hostile aux interrogatoires violents, autant j’ai trouvé normal de me porter volontaire pour le " coup de main " qui a suivi cet événement. C’est ainsi que nous devions intercepter les collecteurs de fonds de l’adversaire. Comme la scène devait se dérouler par une nuit sans lune, j’ai eu l’idée d’utiliser les obus éclairants que je possédais en magasin. Mais pour nous placer en position de tir, nous avons dû nous rendre dans le village pendant la journée, déguisés en Arabes avec les obus dans nos sacs. Par chance, nous avons réussi à passer inaperçus et le coup à réussi.

 

Comment s’est déroulé la fin de votre séjour en Algérie ?

 

     A la suite d’évènements au sein de la compagnie où je m’étais peut être montré un peu " subversif ", j’ai été muté dans un avant poste. Il s’agissait d’une maison forestière située à TIGHRET, une sorte de poste disciplinaire dans une compagnie disciplinaire…   nous étions ravitaillés par parachutages pour l’essentiel et j’ai assisté à des scènes très curieuses comme, par exemple, des parachutages, sans parachutes ! Cette ancienne maison forestière se présentait comme un petit blockhaus gardé par une section. . J’étais donc chef de poste et nous montions la garde, nous faisions des patrouilles et nous fournissions des hommes pour renforcer les grandes opérations.

     Dans ce dernier cas il ne restait que 6 à 7 hommes au poste et il m’est arrivé d’en faire partie. Nous avions construit un mirador blindé disposant d’un gros F.M. sur pivot. Nous protégions une tour radio très haute qui couvrait toutes les opérations du secteur. C’est là que deux katybas nous ont donné beaucoup de fil à retordre.

     Un jour, l’avant poste a été attaqué et j’ai dû organiser la riposte. Notre radio était dans la tour et nous nous sommes engueulés au téléphone pour un motif futile portant sur la nourriture. D’un commun accord, nous avons décidé qu’il descendrait de sa tour et que nous nous expliquerions. C’est ce qu’il a fait mais au moment où il devait remonter, nous avons été attaqués. Il a été attrapé et…. égorgé ! Nous l’avons entendu nous appeler jusqu’au dernier moment .

     A la suite de ces évènements, j’ai été proposé pour la valeur militaire mais je ne l’ai pas eue parce que j’ai refusé de " rafaler " un prisonnier dans les barbelés . Je n’ai jamais su si l’ordre du lieutenant était sérieux ou non mais j’ai refusé de l’exécuter. Je suis assez fier de ne pas avoir eu la V.M. pour ce motif.

 

Quelles ont été vos impressions au moment de votre retour en France ?

 

     Je suis rentré en décembre 1961, trois mois avant le cessez le feu. Les copains ont très mal vécu le 19 mars 1962, notamment à TIGHRET. Personne n’a jamais su ce qu’étaient devenus les harkis . Mon expérience en ALGERIE a donc été à la fois courte et dense puisque nous avons assisté à des évènements assez éprouvants .

     Ma réinsertion professionnelle a été difficile. J’étais enseignant et j’ai repris un poste mal payé dans la SOMME. Ma fiancée était alors élève infirmière dans la région parisienne et je vivais tout seul dans une petite piaule froide et bien triste. Au bout de 15 jours, je m’ennuyais. Après avoir demandé la quille comme un forcené, je n’étais pas heureux. Quelque chose me manquait… Non! pas l’ALGERIE, mais la camaraderie et l’amitié des garçons avec lesquels je me trouvais. Je n’étais pas en manque de mitraillettes ni de combats mais de l’ambiance amicale que j’avais connue dans cette collectivité de copains. Sans relation, sans ami et sans aucune considération, je m’ennuyais atrocement.  Comme beaucoup, j’avais pris l’habitude de boire en ALGERIE et j’ai continué pendant quelque temps. Ensuite, je me suis marié et les choses se sont un peu arrangées puisque je n’étais plus tout seul. Nous vivions chichement dans un tout petit meublé froid et sans confort et j’avais un peu le sentiment des vieux de 14 qui disaient : " Dire qu’on s’est battu pour ça, qu’on s’est fait casser la gueule pour la France et qu’on n’est pas mieux traité en retour…. ". J’étais indigné. D’autant plus que dans mon métier, beaucoup de gars s’étaient arrangés pour ne pas partir, que leur carrière avait couru et qu’ils étaient , au même âge que moi, titulaires avec 3 ou 4 années d’ancienneté. Moi, j’avais fait mon devoir comme la plus part des jeunes Français de ma génération et j’avais l’impression qu’on me faisait payer l’ALGERIE. Je me sentais réellement brimé.

 

Extrait d’un article paru dans le magazine l’Ancien d’A.F.N. N°110 paru en avril 1986.

Ce texte m’a été fourni par A. ROUSSEL

 

 

 

  

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20 janvier 2009 2 20 /01 /janvier /2009 14:57

AZRAYEN   ou l'ange de la mort

Texte de Franck GIROUD
Dessins et aquarelles de Christian LAX
Préface de Benjamin STORA



        Une histoire imaginaire......... La recherche d'une section perdue en KABYLIE , débouchant sur la réalité de ce que fut la guerre d'ALGERIE .
       Une magnifique bande dessinée restituant l'ambiance de la guerre d'ALGERIE, telle que l'ont vécue les deux millions de jeunes FRANCAIS envoyés, malgré eux défendre une cause qu'ils ne comprenaient pas toujours très bien;
      L'auteur y retrace la vie de tous les jours dans une contrée difficile " la KABYLIE" .
      L'action des SAS ( Section Administrative Spécialisée ) qui enseignent et soignent les populations autochtones et assurent toutes les tâches administratives dans le bled.
     La guerre avec ses travers.

    Un très beau livre qui nous replonge 50 ans plus tard dans des situations que nous avons vécues, alors que nous n'avions que 20 ans.

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16 janvier 2009 5 16 /01 /janvier /2009 15:44

CRAPAHUT : un livre de Jean Pierre BRESILLON sur sa guerre d’Algérie au 22ème RI

 

L’auteur raconte sa vie de poste avec son ambiance d’attente, de sentiments d’inutilité. La vie matérielle à organiser, les gardes de jour comme de nuit avec leurs angoisses, les ouvertures de route. Quelques trop rares « liaisons » dans un monde civilisé voisin, mais inaccessible, et un jour comme un autre le « pépin » avec ses morts et ses blessés………. qui rappelle que la guerre n’est jamais gratuite.

 

Bien écrit par un homme qui sut bien observer, et surtout retenir. C’est l’histoire « banale » du soldat de circonstance, pas « volontaire » du tout, mais qui fit son boulot parce qu’on l’avait affecté là, qu’il avait des copains et des chefs immédiats qui partageaient sa « misère » et comptaient également sur lui.

 

Un livre extrêmement intéressant ……… A lire……… mais malheureusement épuisé en librairie et que l’on peut toutefois se procurer d’occasion sur internet.

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4 décembre 2008 4 04 /12 /décembre /2008 22:20

  UNE OPERATION PILOTE DANS LE SECTEUR DE TENES


Printemps de 1957.  La bataille d’Alger est en cours. Dans le bled, la rébellion s’efforce de prendre en main la population par la terreur. L’implantation de nos unités est encore trop « centralisée », leur action inadaptée à la guerre révolutionnaire. L’administration, dont les moyens sont insuffisants, ne peut faire face à la situation. Le partage «  et ce n’est pas un vain mot » des responsabilités entre civils et militaires conserve une rigidité de temps de paix. En haut lieu , on décide de faire, dans la zone d’Orléansville, un essai de coordination des efforts tendant à rendre au pays son climat de sécurité. C’est l’opération « pilote ». L’Orléansvillois est une zone fertile, assurant un passage essentiel  entre l’Algérois et l’Oranie. En outre, il est encore un « havre de paix », constituant une plate-forme favorable aux actions projetées ; c’est le pays des Beni-Boudouane, placé sous l’autorité du Bachagha Boualem, homme au grand cœur , intelligent, courageux, vivant en permanence et de manière rustique, au milieu de sa tribu ; son prestige s’étend largement au-delà des limites du territoire dont il a la charge administrative. Pour mener l’opération « Pilote » qui sera finalement une réussite, le commandement détache dans les unités de la zone des cadres prélevés sur ses troupes de réserve ; c’est le cas du capitaine Assémat, auteur des lignes qui suivent. Ces cadres se passionneront pour la tâche qui leur est confiée et en resteront profondément marqués pour l’avenir.

 

 

 

                                                                  Général  J. GRACIEUX

 

 

Le 15 mars 1957, sans que rien l’eût laissé présager, je reçu un ordre de détachement me mettant pour trois mois à la disposition du général de Brébisson, commandant la zone Ouest Algérois, dont le P.C. était à Orléansville.

Nous étions un certain nombre dans le même cas, tous parachutistes. Pourquoi cette période fut-elle pour moi la plus belle, la plus exaltante de ma vie, celle qui laissa en moi le meilleur souvenir, je l’ignore.

Le général me reçu très courtoisement ; son chef d’état-major aussi. Nous nous connaissions de longue date. Ses adjoints des  2ème et 3ème bureaux firent pour moi un historique de la rébellion dans les massifs du Zaccar et du Dahra et me souhaitèrent bonne chance. J’avais au moins appris que je devais me présenter, dans les meilleurs délais, au commandant de secteur.

Ténès changeait beaucoup d’Orléansville, trop hâtivement reconstruite. Ténès était la ville barbaresque fortifiée, ancien nid de pirates. Son port, bien protégé des vents d’ouest, ne connaissait plus que des chaloupes ressemblant étrangement aux pinasses du bassin d’Arcachon, si ce n’est l’étrave en col de cygne et la poupe plus arrondie, plus écrasée, permettant de lover le filet.

                  Les "Sourettes."


Le bataillon vietnamien campait sur la plage. Le soir au mess, je dinai avec Lagaillarde, lieutenant para en mission dans le coin.

Le colonel du 22ème R.I. m’envoya au 1er bataillon lui appartenant bien peu puisque dépendant du secteur de Cherchell, prendre le commandement de la 3ème compagnie.

Le convoi partait le lendemain à l’aube, un lendemain qui s’annonçait curieux. Je devais, en effet, prévenir le capitaine de cette compagnie qu’il était relevé, poursuivre sur Gouraya, me présenter au chef de bataillon et me rendre à Cherchell pour y prendre les ordres.

La route serpentait entre la mer d’un bleu profond et la montagne. Le convoi traînait, s’étirait en passant près de la baie de l’Ancre, dans laquelle avait sombré un vaisseau hollandais chargé de bonnes sœurs. Il restait de cette affaire, sur la plage, une ancre rouillée et dans la montagne, un marabout, celui d’Imah el-Mah, dédié à la mère supérieure qui avait su se rendre indispensable par ses connaissances médicales. Quant aux bonnes sœurs, les sourettes, elles avaient engendré beaucoup de petits montagnards, les « tournis », en général rouquins, ce qui, comme chacun sait, porte la poisse.

Francis-Garnier, Dupleix.  Halte sur la place du village dans un désordre bon enfant. Le capitaine me reçu fort mal. Je le comprenais mais je n’y pouvais rien. Il fut décidé que la passation des consignes aurait lieu à mon retour ; dans l’intervalle, il préparerait sa cantine et les pièces comptables.

Villebourg, Bois-Sacré, où je retrouvais un chef de bataillon, ancien para, qui m’avait succédé, dans l’Aurès, au commandement du centre d’instruction des Aurès-Nemencha, monté par moi quinze mois plus tôt.

Messelmoun, la ferme Tesseire, où l’ambassadeur Robert Murphy et le général Clark s’étaient réunis clandestinement avec les envoyés du général Giraud pour préparer le débarquement américain.

Cherchell. Le lieutenant colonel Lecointe me donna enfin des directives sans enjoliver la situation. Quelques jours plus tôt, un convoi de permissionnaires était tombé dans une embuscade, à mi-chemin de la piste joignant Bouyamène à Dupleix. Les hommes, désarmés, n’avaient pas pu se défendre. Les rescapés étaient rares et le moral de tous était sérieusement atteint.

Sur le plan des opérations, je dépendais de lui et j’emploierais au mieux, en plus de la 3ème compagnie, le G.M.S. de Villebourg et la 2ème compagnie de Bouyamène.

 

         Assassinats organisés

 

Le village de Dupleix avait un maire, Roger Trasaillon, un adjoint au maire, Mohamed Djabout, et d’autres encore, que je connaîtrais par la suite et dont j’apprécierais les mérites divers. Il y avait aussi une école, une école, une église, un marabout, une brigade de gendarmerie, un monument aux morts, une caisse coopérative, un bordj construit il ya fort longtemps et même une hétaïre florissante et des fleurs partout, grimpant à des pergolas.

Dupleix était un album dont on ne tourne les pages que lentement. La vie y avait été douce et l’on y venait de loin chasser le sanglier ou manger la langouste.

Chacun me raconta son histoire, l’histoire du pays, les deux se confondant, se mêlant à l’histoire de France. 1848, 1852, 1870, 1914, 1942 après 1940-1945. L’Alsace, la guerre, les guerres, Verdun, l’Italie, la libération, d’abord du sol natal, puis de la métropole. L’Indochine, où le fils Buthiou, les propriétaires de la ferme où logeait la compagnie, avait été tué le 22mai 1947. Son grand père, géomètre, avait relevé la topographie du pays ; son père et d’autres avaient fondé la coopérative. Le maire, un colosse débonnaire, cultivait sa vigne comme tout le monde ici, et possédait cinq à six hectares de muscat somptueux vendu à Alger ou de chasselas qui faisait un vin délicieux.

Tout avait été merveilleux jusqu’au jour de cette embuscade. Depuis, le marché était vide. Le café maure aussi, voisin du « café hôtel restaurant » Espy, où le cœur n’y était plus. Les gens de la montagne et les forains ne venaient plus. La peur s’était installée ; les gens se terraient chez eux. Peur des fellaghas, qui avaient aussi coupé quelques nez et quelques lèvres. Défense de boire, défense de fumer. La loi de l’assassinat organisé avait marqué tout le monde et surtout la compagnie. Faire le croque-mort, quand on a vingt ans, n’est pas une besogne agréable.

Il fallait pourtant bien peu de chose pour reprendre la compagnie en main. Tout d’abord la sortir d’un cantonnement écoeurant de saleté, lui redonner sa fierté en lui faisant suer sa peur, l’amener dans la montagne, non pas en expédition punitive, mais pour y connaître la population. Et pendant ce temps, nettoyer, gratter, décrasser. Il suffisait d’avoir de bonnes jambes, du souffle. Au début mes « cosaques » firent un boucan de tous les diables. Ils avaient froid, faim, soif. Il est vrai, que pour la première expérience, nous étions partis quatre jours avec deux journées de ration !….

 

Les époux de Fatima.

 

Et le temps a passé. Transformée, remaniée, la compagnie avait une autre gueule. Ses cadres, en grande majorité du contingent ou rappelés ou maintenus, en voulaient.

« Le douar Damous est dur, vous aurez de la peine »

Ce fut la fraction des Beni-Hatteta qui prit le virage la première. Il y avait là une jeune femme, « Fatima », l’homme de la famille. Son premier mari la délaissait pas mal, buvait beaucoup et l’ennuyait tout autant. Les mauvaises langues prétendaient qu’une nuit où, n’ayant pas retrouvé la porte de sa « dechera », il voulu passer par le toit. Fatima lui aurait fort proprement fait sauter la cervelle d’une charge de chevrotines, le prenant pour un brigand. Son deuxième mari, un taleb ambulant qui allait de fraction en fraction en transportant ses tablettes, avait été étranglé par les rebelles et nous avions retrouvé son corps, le lacet au cou, enfoui dans un bosquet d’amandiers ;

Fatima entraina les femmes. « Entre dégourdies » disait-elle en clignant de l’œil, toute poitrine an vent, solide sur ses jambes, sans complexe aucun. Elle se remaria une troisième fois pour 15000 anciens francs et un coffre contenant sept robes et autant de foulards. Le forgeron, son nouveau mari, tapait aussi allègrement l’anisette ; ça n’a pas duré. C’est une bouteille pleine qu’elle lui a cassé sur la tête avant de remonter dans sa fraction bien-aimée. Une maîtresse femme !….

Le commando zonal F.L.N. avait ramassé tous les papiers d’identité avant de monter son embuscade. Une semaine sur le terrain, razziant les femmes, les poulets. Inconcevable : personne n’avait rien dit, rien vu. « Les militaires ne venaient pas . Pourquoi serions nous allés le leur dire au village ? ». Paroles pleines de bon sens. Mais il fallait recenser le douar et les quatre autres douars voisins.

 

  Les murs de l’école.

 

Bouyamène construisait un nouveau poste. Les effectifs de la compagnie avaient été complétés. Le G.M.S.de Villebourg sortait. Il ne se contentait plus de sillonner la route de Bois-Sacré à Dupleix. Les autres G.M.S. marchaient, eux aussi. Un vent d’activité entrainait ces unités. Mais le nerf de la guerre est toujours l’argent et mes convictions m’empêchaient de monter des attaques ,ou de rançonner les passagers  de l’autocar. Point d’argent, point de suisse. Je n’avais que ma solde, que j’engageais dans l’achat d’un agrandisseur, de papier, de pellicules, de bacs,  révélateurs et autres ingrédients nécessaires pour faire de la photo.

Un sous officier, photographe semi professionnel, avait un appareil. Il prit la jeep et trois hommes et commença par photographier les gens auxquels le maire délivrait ensuite de nouveaux papiers d’identité.

Les Beni-Hatteta, comme d’habitude fournirent les premiers clients. Certaines filles étaient ravissantes. Les hommes s’habillaient bien, les anciens combattants accrochaient leurs médailles.

La photo était payante. On opérait sur la place ou devant le mur d’une maison. C’était plus pratique que d’aller à Cherchell, moins onéreux aussi. La photo à domicile était plus chère. L’homme riche du pays avait quatre femmes. Il fallu se déplacer. Ce fut presque une fête.

Et puis ce fut la première école, la première pierre posée grâce au maire, qui préleva sur ses crédits de piste. Ce furent aussi les premiers éléments d’une harka commandée par un ancien sous officier de tirailleurs ; les premiers bénéfices tirés de l’exploitation de la coupe du bois « cinquante mètres à droite et autant à gauche de la piste tragique » bois transformé en charbon par des hommes qui l’avaient fait plus ou moins clandestinement de tout temps.

J’avais remis les hommes à la tâche. Ils servaient de choufs et de courriers, se relayant entre eux. Le colonel tenait parole. J’avais les rênes longues et il me prêta des camions pour faire la navette avec Alger, où le charbon valait 17,50 francs anciens le kilo au marché officiel, c’est à dire avec un permis délivré par les Eaux et Forêts. En contrebande ou au marché parallèle, il valait moitié moins.

Alors, moitié-moitié. L’Administration, n’ayant pas très bien compris l’intérêt de la chose, limitait l’octroi des permis. Pourquoi ? jusqu’au jour où les gardes forestiers de Gouraya voulurent se rendre sur place pour voir. Il fallu une scène plus vaste que celle du Chatelet pour les mystifier, mais ce fut fini . A nous les permis, au douar les revenus d’un travail pénible.

Les murs de l’école montaient. Le docteur Mazourenak donnait ses consultations dans la montagne, à domicile. Alzera, l’interprète, le suivait partout. Il avait maintenant une aide, une E.M.S.I. Le samedi, jour de marché, il consultait à l’infirmerie.

Les voitures étaient maintenant toutes prises. La jeep par la photo, le Dodge  par le chantier de l’école, l’ambulance…… J’usais ma Simca sur la piste.

 

    Servier , l’ethnologue….

 

De là-haut, la vue était merveilleuse, vers la mer comme vers le djebel Nador. La vigne alternait avec les arbres fruitiers, les conifères et les eucalyptus pour composer le plus verdoyant tapis de la terre. C’était tellement beau que, pensant aux fatigues futures, j’avais fait construire le long de l’école, face à cette splendeur, un banc assez large pour y faire la sieste et y dormir la nuit.

Trois mois. Trois mois renouvelable pour réussir, ramener la paix. C’était tellement peu. Pourtant, le rythme était pris. La harka veillait sur la fraction, une section de Dupleix qui grognait, au départ, comme si la paix n’était pas là-haut. Le reste « crapahutait », poussant vers le sud, amenant photographes, médecin et infirmiers, E.M.S.I aussi, qui en ce mois de mai ou juin, préparait une rentrée des classes qui se ferait sans attendre le mois d’octobre. L’école s’achevait. Je fis porter la bonne nouvelle à Gouraya et à Cherchell, reprenant ainsi un contact délibérément rompu le second jour de mon arrivée ;

Du monde, beaucoup de monde, à cette inauguration. Des gens venus de partout pour admirer des gosses astiqués de frais, en tablier à carreaux, et une école meublée de bancs volés par nous à Villebourg, je crois, à moins que ce ne fût dans le secteur voisin. Les couleurs claquaient bruyamment, car il faisait grand vent, à un mât qui terminait là sa carrière de poteau télégraphique de réserve, lui aussi volé au bord de la route avec d’autres qui attendaient le moment de servir la France de cette manière.

Jean Servier, l’ethnologue, auteur du livre, Dans l’Aurès, sur les pas des rebelles, écoutait Djabout prononcer les mots qu’il fallait. C’est là que j’ai appris que nous participions à l’opération «  pilote » et que tel Mr Jourdain , nous faisions de la psychologie sans le savoir.

La « bataille d’Alger », l’opération « pilote », tout s’enchaînait. Ayant participé à la moitié de la première, je menais la seconde dans mon coin, à ma guise, aidé magnifiquement, maintenant, par la compagnie, qui poussait de l’avant sans s’endormir. Où était sa crasse d’antan ?

Il y avait beaucoup de monde, certes, mais bien moins pourtant que pour le pèlerinage de Sidi Mohand Ouchir, qui eut lieu peu après, plus haut encore dans la montagne, là où fut planté notre deuxième mât des couleurs.

« L’Algérie restera Française. Bienvenue aux Beni-Hatteta » avait écrit au tableau noir, en belle écriture ronde, le sous lieutenant Duval, maître d’école dans la vie civile , quelque part en France, avant de céder son estrade à Belamiche, soldat de première classe, instituteur lui aussi, mais à Oran.

 

   Discours, bonne humeur….

 

La rébellion avait interdit la fréquentation des lieux saints aux musulmans. Il fallait rétablir ce droit et le faire ostensiblement.

Le pèlerinage fut somptueux. Plus de cinq mille paysans étaient venus avec femmes et enfants, à pied ou à dos de bourricot. L’immense esplanade, proche du marabout, n’avait jamais connu pareille affluence , au dire du descendant du saint homme, colosse aux lunettes rondes cerclées de métal. Dupleix était monté : ma famille aussi, venue me rejoindre pour les vacances, avait fait le déplacement, ma femme à dos de mule, les enfants à pied. Il y avait aussi le sous-préfet, le colonel commandant le secteur, les gendarmes.

Discours. Bonne humeur. Couscous pour tous, et pas au beurre rance, cuit dans les dechras proches et porté sur la tête dans les djefanas de bois tendre recouvert de foulards multicolores. Moment de piété, quand fut déposée une gerbe sur le tombeau, sous les oriflammes et les bannières vert, rouge et or des confréries et des zaouïas.

La harka avait défilée le 10 mai à Orléansville. On parlait d’elle pour le 14 juillet à Paris. Depuis Bou-Saada on était venu engager des hommes fiers pour compléter les effectifs d’une compagnie nomade. J’avais maintenant un porte fusil, un aspirant harki de dix sept ans qui vivait ma carabine U.S. sur le cœur . Je mangeais et dormais n’importe où, soit avec mes hommes, soit dans le premier gourbi venu. Nous avions organisé une campagne de propreté. Les femmes avaient vidé les maisons pour refaire les sols en lissant la terre glaise avec la paume de leurs mains. Les murs des pièces avaient été passés au blanc ou, mieux, au bleu.

Le maire et moi projetions de construire une autre école à Tala-Ykorn, à mi-chemin des Beni-Hatteta et de Bouyamène. Le sous-lieutenant Faure s’occupait activement de cela, aidé par le futur maître d’école, le caporal-chef Couraly.

Mon interprète, Alzera, celui qui finissait toujours par débrouiller les choses

 Compliquées, était rassurant. Et pourtant, quelque chose ne tournait pas rond ; je le sentais.

 

            La mort de Merzoug.

 

         On m’avait bien barboté la borne du kilomètre 4 pour en faire un lieu saint. Replanté à quatre cents ou cinq cents mètres de la route, sous un cèdre, je la retrouvais entourée de lampe à huile d’une facture romaine indiscutable, et d’assiettes de couscous et de fruits secs. Nous en avions bien ri. Mais maintenant, c’était autre chose. L’atmosphère était lourde, oppressante. J’étais inquiet et ne pouvais le montrer .

         Et puis, dans la nuit du 13 au 14 juillet, mon plus vieil ancien combattant, Abdelkader Merzoug, fut égorgé et émasculé près de l’endroit où avait été étranglé et découvert le deuxième mari de Fatima.

         Il n’y eut pas, ou peu, de 14 juillet. J’écourtais la cérémonie au monument aux morts en annonçant publiquement que nous prendrions l’assassin de Merzoug et que je le tuerais.

         La deuxième école sortait de terre. Son emplacement avait été bien choisi, près d’un col, à proximité de dechras  isolées que je voulais, grouper pour créer l’amorce d’un village. Chaque matin, il faudrait trouver de nouveaux subsides pour faire manger les enfants, il faudrait piller une autre école abandonnée pour meubler la nouvelle. Il faudrait…. Marcher davantage, soigner davantage, aimer plus encore.

         Le marché de Dupleix était de plus en plus florissant et un marchand de tissus avait eu ce mot en me voyant acheter un pantalon pour un garçon : « tiens mon capitaine, prend cette ceinture ; tu as payé le pantalon, je peux bien faire ça. » Le garde champêtre n’avait pas de problèmes.

         La S.A.P. distribuait de nouveau le grain de semence, les gens venaient de Breïra, de Gouraya, de Cherchell. Le recensement était achevé, les battues au sanglier avaient repris et les rabatteurs tiraient de nouveau au pistolet d’arçon modèle 18…. Les jeunes tapaient sur des casseroles, c’est moins noble, mais aussi bruyant.

         Ali Bacor dit Ali la Figue, notre grand mutilé, avait offert une loubia sur la place du village. Il voulait se marier pour la quatrième fois avec son épouse, ce qui posait des problèmes coraniques.

         On m’avait offert un djefana taillé à la main dans du bois tendre.

         Mais Merzoug était mort et cette idée me rendait malade.

         Les trois compagnies cherchaient, battaient l’estrade ; la harka fouillait le Nador. Il ne faisait aucun doute que les deux forfaits avaient été commis par le même homme.

         La 10ème division aéroportée, sur intervention du commandant de secteur avait prolongé de trois mois mon détachement. L’été était radieux. Ma femme amenait à la plage les filles du pays qui se baignaient nues comme la main. Ali garde du corps et aide chauffeur, faisait un demi-tour très règlementaire pour tourner le dos aux naïades et surveiller le rocher Djillali qui dominait la place.

         Puis nous avons pris l’assassin et nous l’avons abattu au cours d’une opération. Et le lendemain, j’envoyais mes fils passer la journée dans la famille de cet homme. Ils y sont retournés, moi aussi. Nous aussi.

         Le village de Reuff, seul, ne venait pas encore à nous. Ses habitants, depuis longtemps, jalousaient les autres fractions. Pourtant, leur nid d’aigle dominait des vignes semblables à celles des autres villages et leurs abricotiers étaient aussi beaux, aussi productifs. C’était dans leur caractère de vivre à l’écart, face aux mines de Bacira que l’on apercevait sur l’autre rive de l’oued Damous. Il enviaient je ne sais quoi.

         Il a fallu de la fermeté, un mât des couleurs, un clairon pour sonner  le réveil et l’extinction des feux, et puis qu’une gamine fût blessée, à la tombée de la nuit, par une grenade oubliée, perdue ou abandonnée dans l’oued. Il a fallu la solidarité de tous pour la transporter de nuit à Cherchell. Il a fallu l’intervention chirurgicale. Il a fallu risquer d’autres vies pour la sauver. Alors, ils sont venus pour avoir leur école, pour que je fusse aussi leur juge et l’arbitre de leurs partages successoraux, partages si compliqués que personne ne voulait accepter cette tâche.

 

            Un coupeur de Balenciaga.

 

         La compagnie, ma compagnie, avait maintenant fière allure. Le village vivait, revivait ; la montagne aussi, après la tragédie du mois de mars. Les maîtres d’école amenaient leurs élèves se baigner. Ils partaient de bonne heure, à travers la campagne, en descendant vers la plage, et remontait le soir, en camion, après la sieste. C’est un coupeur de chez Balenciaga, le radio de la compagnie, qui avait confectionné les maillots de bain dans de la cretonne à grande fleurs orange et rouges. Puis tous prenaient leur repas dans le vieux fort où logeaient des familles de rebelles qui vivaient de la vente des poteries fabriquées par les jeunes filles sous l’œil soupçonneux des vieux.

         Les jeunes filles, dans cette région, restaient dévoilées jusqu’à quatorze ans environ. Puis elles posaient sur leur coiffure une serviette de bain en tissu éponge avant de mettre le voile drapé à la cherchelloise, qui ne laissait apparaître qu’un œil.

         « Toi qui as la force, toi qui as la loi, pourquoi ne supprimes-tu pas le voile ? »

         C’est ainsi que, n’écoutant pas cette enfant, je manquais l’occasion de soulager un peu ces femmes dont, pour certaines, la condition était moins enviable que celle d’un mulet.

         Le temps passait. Le Sakalave, contre-torpilleur de la Royale, avait jeté l’ancre dans la baie pour le jour de l’Aïd-el-Kebir. Nous avions tiré le canon, un canon sans recul installé dans le bordj. Il avait répondu de même. L’équipage était descendu à terre. Les officiers avaient mangé le couscous  aux Beni-Hatteta, où j’envisageais sérieusement de faire construire un cabanon ;

         Les choses s’enchaînaient et pourtant, aucun emploi du temps n’était régulier. Nous vivions à la broussarde, dormant le jour, écoutant la nuit, à l’aise, maintenant, dans ce terrain tourmenté, coupé de ravines profondes et boisé de pins et de taillis épais. Nous savions où nous retrouver ; Les charbonniers, eux aussi, participaient, assis à l’écart de leurs tumilis de terre sous lesquels charbonnait lentement le bois de chêne-liège.

         Je marchais beaucoup, ma voiture ayant rendu l’âme. Un soir, rentrant de Bouyamène après avoir abattu une quarantaine de kilomètres depuis l’aube, je fus arrêté par les femmes d’une fraction qui, sans explication, firent lever leurs hommes pour me faire escorte jusqu’à Dupleix. Pourquoi ? Pourquoi chercher à savoir ? Quelque chose avait changé.

         Le maire taillait des fusils dans des roseaux pour mon plus jeune fils. Le médecin avait engagé une E.M.S.I. auxiliaire dans le village. Réfractaire au voile, elle apprenait à soigner. Son père la surveillait, craignant on ne sait quoi, mais la coquine avait un œil de braise.

 

            L’instituteur m’écrit.

 

         Je partis en permission, anxieux de retrouver mon douar Damous. Les autres aussi, mais mon cœur était là-haut, à Tizi-N’Taka, où se construisait le nouveau village, aux Beni-Hatteta, où les enfants chantaient si bien la Marseillaise, à Reuff, où une vielle grabataire vivait grâce aux piqures du docteur Mazourenak, qui prolongeait sa vie.

         Et à mon retour, la vie reprit. Un autre pèlerinage à sidi Mohand Ouchir devait avoir lieu en mon honneur parce que je partais ; Six mois déjà ! L’instituteur du douar m’avait écrit. Je garde cette lettre comme la plus belle des citations ;

         J’avais passé des jours et des nuits dans cette montagne que j’aimais, à discuter avec les hommes, à parler de la France, que presque tous connaissaient. Le « Parisien », oncle se Fatima, racontait Paris ; les autres parlaient de leurs campagnes. On riait en écoutant les histoires de brigants qui faisaient payer l’impôt aux voyageurs lorsqu’ils passaient le Tizi-N’Taka, au pied du Nador, là où maintenant flottait le drapeau tricolore. Tous les matins, on le levait un peu partout et jamais personne n’avait coupé les drisses qui servaient à le monter.

         La paix était là. On pouvait la sentir.

         L’Association des maires de France avait envoyé une délégation. Dupleix était jumelé avec Pouillac. L’opération « pilote », comme l’été touchait à sa fin.

         Merci à tous. Merci à ceux qui ont compris où était la paix.

         Mais comment pourrais-je oublier les six mois les plus beaux de ma vie passés dans ce douar perdu ?

 

 

                                                        Capitaine J. ASSEMAT

 

 

  Le texte est extrait d'un ouvrage intitulé " La France contemporaine - La guerre d'Algérie"
   Les photos sont de la collection du Capitaine ASSEMAT, et la carte postale est personnelle.

  

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1 décembre 2008 1 01 /12 /décembre /2008 17:44

SOUS LIEUTENANT AU 2/22ème R.I.
                                                                                                                                                                On est évidemment frappé par la disproportion des moyens mis en oeuvre ainsi que par le déséquilibre entre l'armement des fellaghas et l'importance de ce bombardement. Le témoin a pu juger sur pièce de cette situation. L'armée Française peut ainsi être économe de vies humaines. Quant à l'ennemi, elle l'anéantit si elle le repère. N'oublions pas qu'à cette époque, la philosophie du Café du Commerce à propos de l' ALGERIE était simple: " Y a qu'à mettre le paquet ! "  Que fallait-il de plus?

Toutefois, certains récits de militaires stationnés en ALGERIE  font état de la supériorité des fellaghas dans d'autres domaines: science du terrain, sens de l'opportunité, organisation des embuscades, etc.... Et dans ces cas-là, les soldats Français se sentent en situation d'infériorité tactique comme nous le rapportent les témoins suivants.

 

Maurice CAMUS est Sous-Lieutenant appelé au 2/22ème Régiment d'infanterie. Dans le secteur de TENES, il encadre une harka:

Le 13 mai 1958 venait d'éclater.....

 

Avec ses manifestations que je me garderai bien de juger, les avis là-dessus étant tellement contradictoires. Tout ce que je puis dire, en toute honnêteté, c'est qu'elles m'avaient laissé à l'époque plutôt sceptique.... J'allais à TENES rejoindre une unité bien combattante, le 22ème RI. Reconstitué en mai 1956 dans la région de CLERMONT-FERRAND avec des rappelés, il fut affecté aux secteurs de TENES ( 2 bataillons ) et de CHERCHELL( 1 bataillon, PC à GOURAYA ). Cette unité comme tant d'autres formées à la hâte, avait connu bien des vicissitudes et des coups durs dès son arrivée. En 1958, la barre était un peu redressée mais le secteur n'était pas sain. Les anciens avaient des souvenirs à raconter. Le Djebel BISSA notamment, dans la chaîne côtière entre FRANCIS-GARNIER, BREIRA, HANOTEAU, FLATTERS, avait une triste réputation: ses sommets dépassant mille mètres, ses zones boisées constituaient des sanctuaires pour les katibas. Son placement en zone interdite n'avait pas réglé le problème. Nous applaudissions quand les T6 venaient straffer par ici et nous appréciions en connaisseurs quand les roquettes éclataient à tous les échos. Affecté à la 7ème Cie du 2ème Bataillon, j'allais tout d'abord seconder un sous-lieutenant du contingent dans un poste très éloigné....  Oued HAMELIL, déjà utilisé par les ROMAINS. En creusant pour établir des soutes à munitions, nous trouvions des vestiges importants. Je me souviens de l'intérêt qu'avait porté le Lieutenant-Colonel commandant en second le régiment, pour ces vestiges du passé....  Malheureux homme, nous apprenions avec tristesse, une huitaine de jours après, qu'il venait de sauter sur une mine et qu'il avait trouvé la mort......

Rappelé à la compagnie pour remplacer un officier d'active nommé ailleurs, j'étais promu chef de la 5ème section. J'allais connaître pendant plusieurs mois toutes les opérations à l'échelon sous-quartier, quartier, secteur, voire zone. J'étais aidé dans mes responsabilités par un sous-officier d'active, un vieux briscard, mais tout le reste de ma section faisait partie du contingent ou peu s'en fallait. J'allais également bénéficier de l'appoint de quelques harkis dont j'eus à louer les qualités.

Je tiens à dire ce qu'était un officier de réserve en AFN à cette époque: un appelé effectuant son service militaire, qui avait quelque ascendant sur ses hommes, des copains appelés comme lui bien souvent, non seulement par sa barrette qu'il ne portait d'ailleurs pas toujours, mais souvent par les quelques années supplémentaires qu'il avait sur eux. Ce jeune officier se devait de commander pour " le bien du service " évidemment, mais aussi, il se devait de prendre les précautions indispensables pour veiller au maximum de sécurité de son petit monde. Combien de fois il a fallu adapter les ordres d'en haut, combien de fois le chef de poste ou de section a dû, chez ses hommes, secouer quelques négligents ou lutter contre certaines routines sachant que l'ennemi guettait dans l'ombre et se tenait prêt à exploiter la moindre défaillance. Mais l'officier de réserve restait près de la troupe et je pense que la plupart du temps, les sous officiers et les soldats l'estimaient. Que l'on sache que durant ma vie de chef opérationnel, j'ai longtemps collaboré avec un sous lieutenant d'active frais émoulu de COETQUIDAN, qui commandait la section voisine et que nos rapports furent excellents. Peut-être est-il haut placé dans la hiérarchie maintenant.

 

9 décembre 1958:

 

Par un matin pluvieux, le capitaine FRANCES de la 7ème compagnie allait visiter et ravitailler le poste de OUED HAMELIL situé à une douzaine de kilomètres de HANOTEAU en empruntant la seule route praticable, de surcroît peu sûre car souvent défoncée et encaissée. Une section à pied était partie devant, se placer sur une hauteur, et ma section prenait place sur les véhicules pour faire escorte. A mi-chemin, près du pont de l'oued ZERGA, la fusillade éclatait. Heureusement une vive riposte devait nous sauver la vie. Hommage ici aux petits soldats qui ne s'en laissèrent pas compter. Hommage à TIDJERMINE qui fut blessé à sa mitrailleuse, au petit TORMO qui, sous un feu nourri, prit sa place et de ce fait en imposa à l'ennemi, hommage aussi à LIEFOG qui, à mes côtés, vida chargeur sur chargeur avec son PM. D'autres seraient à citer, le grand DUTEAU avec son FM. MAINTIER, mon tireur d'élite avec son fusil Mas 49.

Honneur aussi au T6, qui, bien que peu efficace, car seul et gêné par le plafond bas fit baisser la tête à l'adversaire et contribua à assurer le relais radio avant de rentrer car touché, à sa base. Cette embuscade qui laissait nos camions criblés aurait pu être meurtrière; heureusement, elle ne s'était soldée de notre côté que par 4 blessés. Les fellaghas avaient eu des pertes mais les blessés ou les morts purent être emmenés car le terrain en bordure du Djebel BISSA leur était favorable et nous étions trop faible pour poursuivre....  La pluie tombait drue, l'aviation appelée à la rescousse arrivait avec des moyens accrus, mais un plafond de plus en plus bas, empêchait tout staffing. La nouvelle de cet accrochage lancée dans l'éther ayant été captée un peu partout, nous avons vu arriver successivement, le chef de bataillon, le général GRACIEUX commandant la ZOA. Nous faisions figure de vainqueurs, des Croix de la Valeur Militaire Furent distribuées sur place. Ce sont des souvenirs qui ne s'oublient pas. Que l'on me permette de citer aussi le médecin aspirant ALIFF qui était avec nous dans l'intention de dispenser l' AMG au poste et qui se comporta courageusement sous le feu. Il pansa et réconforta les blessés.

 

28 décembre 1958:

 

Je me trouvais ce jour-là dans le Djebel BISSA lors d'une action à l'échelon bataillon. Après des accrochages infructueux de jour, les rebelles harcelaient à la tombée de la nuit, des éléments du dit bataillon. Au cours de cette affaire, le lieutenant qui commandait la CCAS 2 trouva la mort.

 

27 janvier 1959:

 

Je connus avec mes soldats une journée très dure dans la région de FROMENTIN où nous allâmes avec les artilleurs du 18ème RA et le 3ème bataillon de mon régiment aux prises avec la redoutable Katiba MENOUAR. Dans l'après midi, le combat faisait rage sur tous les pitons, dans le lit des oueds. Dans ma sphère je ne comprenais pas bien ce qui se passait. Ce n'était que canonnades, héliportages, rafales. Ma compagnie tuait un chef rebelle mort héroïquement mais elle perdait un homme. C'est ce jour-là que je vis tout un groupe de fellaghas ( sans doute fuyant devant nous ) qui avaient été abattus par une section héliportée de légionnaires. J'ai entendu dire par la suite que les corps des rebelles avaient été lapidés par les harkis. Je ne l'ai pas vu faire mais c'est possible. La guerre n'est pas toujours chevaleresque. Au cours de cette opération, la katiba MENOUAR avait été très éprouvée, son chef devait être tué un mois plus tard au cours d'une opération à laquelle je ne participais pas. Mon temps de service tirait à sa fin, j'avais aussi, il faut le dire, participé aux propagandes électorales et protégé le vote des autochtones.

CHALLES avait remplacé SALAN, la guerre se devait de prendre une autre forme. L'Etat-Major misait sur les commandos de chasse qui devaient surprendre les katibas au gîte. Ma compagnie voyait ses effectifs fondre un peu plus à cause de cela.

Le chef de bataillon me destina à la protection du phare du CAP TENES.... au bord de la mer, sur un rocher déchiqueté, j'allais avec mes compagnons de solitude, subir les tempêtes de printemps tout en demeurant sur un qui-vive de bon aloi. En effet, l'éloignement de toute troupe amie, le souvenir d'une embuscade meurtrière subie par les aviateurs quelques mois auparavant dans le coin, la faiblesse de mes moyens, la difficulté pour des renforts de parvenir en cas de coup dur, m'imposaient une vigilance non négligeable. Heureusement, ici, tout se passa bien....  Je me souviens d'un petit soldat arrivé à ma section après seulement 4 mois de classe. Quatre semaines après son arrivée, il avait déjà participé à deux actions de feu sérieuses. Je l'entends encore me dire:

" Si je dois faire deux ans comme cela, je ne suis pas sorti de l'auberge! "......... il n'y avait même pas de révolte dans sa voix.

 

 

 

 

 

 

Ce document est extrait du livre "  Témoignages "  édité par la FNACA en 1986, il est reproduit avec leur aimable autorisation.

Photos et carte postale personnelles

Michel.

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