UN ENGAGEMENT DU COMMANDO GUILLAUME AU SUD EST DE GOURAYA
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Le troisième stick venant du fond de l'oued prend contact avec la 1ère Compagnie du 1er B.T.A. vers 17 h.15 à mi-pente.
Le sergent chef DELMAS se présente au Capitaine Commandant la Compagnie. Celui-ci lui indique les positions amies et ennemies et demande de lui prêter son poste radio car le sien est défectueux.
Le radio LANEAU reste avec la compagnie, tandis que le stick prend position face à la crête avec les éléments du B.T.A. encadrants.
Vers 17 h.25 le radio est atteint d'une balle à la poitrine. La balle le traverse de part en part, et rend le poste inutilisable.
Le stick étant pris sous un feu violent venant de la crête et le Commandant de Compagnie n'étant plus là mais plus bas vers un mortier de 60, le sergent chef DELMAS décide de régler l'affaire lui-même.
Le terrain se présente de la façon suivante :
Une pente assez raide coupée de deux faux plats : jusqu'au premier des buissons et des rochers, une ligne de rochers borde le second faux plat. De ces rochers à la crête, le sol est cultivé et le blé haut de 40 centimètres. La crête elle-même est composée d'un amoncellement de rochers d'où émergent des buissons et des arbres. Cette crête s'incline lentement de l'Ouest vers l'Est pour tomber brutalement après les derniers arbres.
A 17 h.35 le stick s'élance : deux équipes de quatre hommes avec le sergent LEGUEVEL en tête.
La pièce, l'équipe de commandement avec le sergent chef DELMAS, la troisième équipe avec le sergent MATTEI en arrière. La progression se fait de buisson en buisson, homme par homme. Quelques grenades à fusil sur les rochers du second faux plat font décrocher le fusil mitrailleur et les dix rebelles qui s'y tenaient. Ceux-ci réussissent à regagner la crête.
Le stick se met en place. Une première tentative pour traverser le champ de blé en force échoue. Le chef de stick est blessé ainsi que deux hommes. Tout le monde se replie dans les rochers.
Courageusement le sergent chef DELMAS, blessé, reprend son stick en main. Il place son fusil mitrailleur à gauche et poste à gauche du F.M. l'équipe réservée.
Le tir des rebelles se partage entre le stick et le reste du commando qui arrive 300 mètres plus bas.. Des éléments rebelles apparaissent à l'Est de la ligne de combat. Ils sont neutralisés par les fusils mitrailleurs des premiers et deuxième sticks.
Le sergent chef DELMAS ordonne le deuxième assaut. L'appui feu est insuffisant et le débouché ne peut se faire. Les rebelles jettent un nombre impressionnant de grenades.
Alors le sergent MATTEI débouche sur le flanc droit des rebelles vers 18 h.15. Il s'empare d'un fusil mitrailleur en le tirant à lui avec la main. Un H.L.L. tire sur le sergent qui tombe en emportant le F.M. COURVALET, MEYZONNADE, CABANAT, RAULET, couvrent leur sergent et tirent les rebelles de flanc.
Le sergent chef DELMAS bondit à ce moment, traverse les 60 mètres de champ de blé et attaque les deux autres fusils mitrailleurs.
En tête le sergent LEGUEVEL est assommé par une grenade explosant sur sa musette. Il a le temps d'abattre les servants d'une pièce. Le caporal UBINGER se bat au corps à corps avec un rebelle; Une grenade les brûle tous les deux. La pièce F.M. du stick, tirant à la hanche arrose les rebelles à trois mètres et tue les servants d'une pièce. Le caporal PINARD, chef de pièce se saisit du troisième fusil mitrailleur.
Le combat se poursuit dans la tranchée creusée sur la crête où sont les rebelles.
Au milieu des explosions de grenades, des rafales de pistolets mitrailleurs, et des fumées des incendiaires, chacun se bat pour soi. Le deuxième classe CABANAT blessé au poignet gauche se met lui-même un garrot et tire d'une main.
Deux rebelles blessés qui rampaient vers un fusil mitrailleur sont abattus.
Le feu cesse. A gauche les hors la loi qui tentaient de déborder, contrés par le feu des deux autre sticks du commando, disparaissent.
Le bilan est éloquent :
- 26 rebelles tués - 1 prisonnier
- 2 fusils mitrailleurs 24/29 - 1 fusil mitrailleur BREN
- 4 pistolets mitrailleurs - 4 fusils GARANT
- 1 fusil MAS 36 - 3 fusils MAUSER
- 1 carabine U.S. - des grenades
- des chargeurs - des équipements et des documents.
Au commando huit blessés dont deux graves et deux armes détruites par balles.
Ce combat engagé par dix huit parachutistes disposant initialement que d'un seul fusil mitrailleur, sans appui de l'aviation ou de l'artillerie, sans l'appui direct des autres sticks du commando, contre une trentaine de rebelles fanatisés, bien armés, bien postés, à montré une fois de plus qu'une troupe bien commandée, aux qualités morales solides, bien instruite, pouvait tout se permettre. L'attaque n'a été menée en force que dans les tous derniers mètres. Toute la progression s'est faite avec beaucoup d'astuce jointe à une technique solide.
Le sergent chef DELMAS qui a mené l'affaire a été magnifique. Il a su faire preuve de beaucoup d'initiative et de beaucoup d'allant, confirmant ses brillantes qualités de combattant.
Les sergents MATTEI et LEGUEVEL, tous deux jeunes sous officiers ont été à la fois ardents et disciplinés. Constamment en tête, ils ont donnés le rythme du combat.
La troupe à été parfaite. Tant les anciens ( engagés et 56 1/B) que les jeunes arrivés au commando deux jours auparavant.
Les exploits individuels ne se comptent pas.
Je pense que ce combat est un des plus beaux qui se soit déroulé en ALGERIE, c'est en tout cas l'un des plus purs puisqu'il s'agit d'une rencontre d'homme à homme sans intervention d'éléments extérieurs.
Je suis fier qu'il puisse être mis à l'actif du Commando GUILLAUME.
Le Lieutenant DOMINIQUE.
Ce document m'a été communiqué par Michel BRUN.