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3 novembre 2010 3 03 /11 /novembre /2010 16:11

LE SERVICE D'ACTION PSYCHOLOGIQUE AU 3/22 R.I. A FROMENTIN

 

TEMOIGNAGE DE J.L.. chauffeur au service d'action psychologique à FROMENTIN.

Le témoin a souhaité conserver l'anonymat.

 

Après avoir effectué mes classes et un stage avec la 59 1/A du 5ème R.I. à BLOIS, je partais en AFN en avril 1960. Je me retrouvais au 3/22ème R.I. dont la CCAS était photo-Fromentin.jpgcantonnée à FROMENTIN (Algérois) petit village de 400 habitants environ. Il était situé sur les plateaux à 30 kilomètres de TENES et autant d'ORLEANSVILLE. Dans ce village, il y avait une vingtaine de familles de souche européenne, la majeure partie était des agriculteurs.

Nous soldats, nous étions éparpillés par service dans les villages soit dans des baraques en bois, soit dans des caves ou des garages. Il va de soi qu'une organisation de défense était en place, avec miradors qui tenaient à peine debout, projecteurs qui fonctionnaient une nuit sur trois faute de courant, barbelés, sacs de sable et autres. Cela me donnait un aperçu de tous les gars qui étaient passés par là avant moi. Bref après un stage de commando à la ferme PEGGY, en trois semaines, et quelques remplacements comme chauffeur de scout-car en ouverture de piste et protection, je me retrouvai chauffeur à l'action psychologique.

Notre service était composé d'un sous lieutenant, un caporal et moi-même. Nous avions une jeep, et un 4x4 Renault muni de haut-parleurs, d'un petit groupe électrogène et d'un magnétophone. Notre mission était, entre autre, d'établir un contact aussi bon que possible avec les populations arabes des villages de regroupement.

On-accompagne-et-on-protege-les-EMSI-dans-les-douars.jpgLes équipes médico-sociales de trois ou quatre personnes, composées en majeure partie de musulmanes, allaient dans les mechtas voir les familles, connaître leurs problèmes, voir leur façon de vivre. L'aide que qu'on leur apportait était très limitée : quelques boites de lait concentré, quelques habits pour enfants, qu'il n'était pas rare de voir au marché quelques jours après. Seul le chef de village avait pouvoir de distribuer les farines ou céréales qui étaient données à chaque village. Il faut dire que ce n'était pas de grosses quantités non plus. La distribution de tracts faisait partie aussi de mes occupations, amener les messages du P.C au chef de village, la garde une nuit sur deux, etc. Au premier abord, cette partie de mon emploi du temps paraissait tranquille, mais en fait j'étais souvent seul ; il aurait suffi d'un fanatique caché à la sortie d'un virage…

Ces villages n'étaient guère loin du PC, quatre à cinq kilomètres pour une population qui variait entre cent et trois cents habitants, composée en majeure partie de femmes et d'enfants. D'autres plus lointain nécessitait une escorte. Les anciens qui étaient là depuis deux ans me disaient : "Tu vas là-bas, c'est un repaire de fellouzes, méfie toi!". Quelques noms de villages : DAR EL MEDA, BENI-MERCLIF, YACHIR, SIDI-ZIANE, BORDJ BAACH, EL AYACHICHA.

Une autre partie de mon emploi du temps était plus casse cou. Mon sous-lieutenant me disait : "Dans une heure vous partez avec le convoi de…. Jusqu'à tel endroit". Je ne savais pas exactement en quoi consistaient ces déplacements. En fait, je me souviendrai particulièrement de celui-là car c'était le premier. Nous étions partis de CAVAIGNAC, entre FROMENTIN et TENES, à la nuit tombée, escortés d'un half-track, son équipage, et une section d'hommes connaissant parfaitement le terrain. Inutile de dire que cette nuit là était une des plus noires que j'ai connues là-bas. Elle avait été choisie, je suppose. Aussi j'ai roulé avec mon Renault jusqu'à une heure du matin. Je ne pensais jamais arriver. Au départ, il y avait quelques lignes droites, je me repérais au half-track qui était devant moi avec une sorte de loupiote. Il faut que je précise tout de même que nous roulions sans phares en plein djebel vers les hauts plateaux pour faire une Scan10029diffusion de démoralisation et de ralliement. Arrivés en zone plutôt dangereuse (32 morts de notre côté dans le secteur quelque temps auparavant en deux embuscades) seuls les hommes de l'escorte me guidaient de chaque côté du véhicule. Je roulais lentement sur une piste qui ressemblait de plus en plus à un chemin muletier. Tout à coup l'un d'eux cria :"Arrête". Après un silence momentané il dit : "Recule, stop! Braque à gauche, avance!" J'avais compris : un ravin sans doute, mais je ne disais rien, je leur faisais confiance, et plus on avançait, plus la piste était difficile. Enfin ce fut Djouni-rallie-toi.jpgl'arrêt. La mise en marche du dispositif pour la diffusion fut faite par un adjudant qui était déjà là avec d'autres hommes.

Cet appel en arabe n'en finissait jamais et résonnait dans la montagne. Je n'étais pas très rassuré car je savais qu'une importante bande de fellaghas était dans les parages, et qu'il fallait faire demi-tour après la séance.

Lorsqu'une quinzaine de jours après je repassai sur cette piste, je me dis : "C'est impossible, avec tous ces ravins, j'ai encore eu de la chance d'avoir fait un aussi bon parcours". C'est un peu de cette façon que j'ai rayonné dans les secteurs de CAVAIGNAC, MONTENOTTE, BORDJ BAACH, HANOTEAU, CHASSERIAU, mais aussi en protection, RABELAIS, PAUL ROBERT, ORLEANSVILLE, TENES, OUED FODDA.

Par ailleurs, un jour, d'ALGER, nous est venu un groupe de trois camions, une compagnie de diffusion, avec un adjudant chef parlant couramment l'arabe. Celui-ci nous dit : "Nous allons faire du cinéma en plein jour et en pleine campagne, vous allez voir". Tous les jours, nous allions de village en village passer des films, de l'endoctrinement. Il faisait de longs commentaires sur les méfaits des fellaghas tuant et incendiant sur leur passage, que leur cause était perdue ; par contre la France construisait des écoles, des logements, etc…..

 

Extrait d'un article paru dans le livre "Témoignages Guerre d'Algérie".

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commentaires

R
Bonjour, j'arrive un peu tard peut-être, j'ai vécu entre 1958 - 1962 je ne me rappelle plus la date exacte, avec mes parents (je devais avoir 6 ou 7 ans) à Fromentin d'abord puis sur le plateau au-dessus du village me semble t-il, une ferme fortifiée qui s'appelait "la ferme Guy" cet endroit parle t-il à quelqu'un? Merci pour d'éventuelles info.
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M
<br /> j'aime beaucoup la france<br /> <br /> <br />
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D
Je suis de Fromentin tadjena
B
<br /> Cher J.L,car tu préfères rester anonyme,je suis passé avant toi à FROMENTIN en 1959 et l'idée que tu te fais sur tes prédécesseurs me parait peu fraternelle.Nous avons vécu dans les mêmes<br /> conditions que toi, peut-être pire? Médites sur tes propos. Avant Fromentin j'ai passé 9 mois à kIMONO 36 à CHASSERIAU et je t'assure que c'était bien pire. Cordialement. B.Barbesange.<br /> <br /> <br />
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A
je veux te me raconte quelque histoire du village fromentin a cette epoque
S
<br /> bonjour, je me trouvai a fromentin montenote alger de septembre 1960 a decembre 1962 infirmier (sergent en 1961 ) je serai heureux de retrouver d,anciens camarade nous donnions des soins au civil<br /> fromentin montenote et cela etait trés appréciés de la population qui regretaient notre départ pour alger j,ai participicer a alger aprés l,indépendence a la récuperation de civil condannés par le<br /> fln j, vécu également babeloued nous étions a climat de france et rue d,islie au camp labat maison carré merci a tous pour la solidaritée qui nous a soutenue pendent ces événements<br /> <br /> <br />
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